Publié le 17 juin 2022
Temps de lecture : 3 minutes

Résidences d’artistes en maisons d’opéra : Thomas Nguyen à l’Opéra de Reims

TEXTEAmélie Cabon
PHOTOSDROITS RÉSERVÉS
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Véritable outil de dynamisation des territoires et d’accompagnement de la jeune création, les résidences en maisons d’opéra se multiplient sur le territoire. L’Opéra de Reims héberge ainsi trois compagnies, dont le Collectif Io dirigé par le compositeur Thomas Nguyen.

Les résidences en maisons d’opéra représentent un mode de soutien privilégié à la production artistique dans sa diversité, comme à la professionnalisation des artistes.
Elles offrent en effet un cadre de travail favorisant la rencontre des artistes émergents avec les publics les plus divers, et cela, au plus près du processus de création artistique. Les artistes et l’institution en retirent des avantages considérables : diversité des créations, circulations nationales des productions, adhésion d’un large public, renforcement de la dynamique artistique de la maison…

À Reims, l’Opéra accueille actuellement trois résidences – Les Cris de Paris, la compagnie lyrique Les Monts du Reuil et le Collectif Io – dans une démarche d’accompagnement professionnel et de diffusion de leurs créations. L’Opéra offre aux artistes un contexte de travail privilégié leur permettant, grâce aux espaces et outils mis à disposition, un renouvellement des formes de création, de production comme de transmission. Les résidences d’artistes sont un soutien clé à la jeune création dans une dynamique d’échanges locaux ou internationaux. Elles permettent également à la structure comme aux artistes d’actionner des leviers afin d’obtenir des financements complémentaires. Champs de liberté, objet de co-construction, force de partenariat, vecteur de liens sur le territoire avec les entreprises, les populations – notamment les plus fragiles – mais aussi les jeunes, ces résidences représentent un instrument important et particulièrement dynamique de politique publique.

En résidence depuis 2018 et jusqu’en 2023 à l’Opéra de Reims, Thomas Nguyen, compositeur, fondateur et directeur musical du Collectif Io, partage son expérience : « En cinq ans il est possible de construire un projet cohérent et conséquent, de multiplier les formes d’opéra. On peut avoir une stratégie dans notre création et effectivement développer des actions de territoire. » Car les enjeux de cette résidence tels que définis par l’Opéra de Reims sont multiples : d’une part la professionnalisation du Collectif Io, l’accord d’une place majeure à la musique de création dans la programmation ainsi que l’ouverture du théâtre au jeune public. Le Collectif dispose ensuite d’une grande liberté d’interprétation de ces enjeux, que ce soit dans la nature des créations ou le type d’actions développées.

« Les rencontres artistiques et partenaires me font réfléchir à ma composition différemment. C’est un processus de collaboration des regards qui favorise l’évolution de ma musique. […] Je me suis libéré d’un certain cloisonnement, me permettant d’accepter le risque et le mélange de couleurs musicales. J’utilise l’acoustique comme l’électrique, des instrumentations particulières qui sont le résultat d’un chemin lié à la résidence et à mon parcours de musicien. »

Longtemps, les contes musicaux et opéras du Collectif Io ont été destinés au jeune public, accompagné d’ateliers et de représentations scolaires. Dans le cadre de la résidence, le Collectif a amorcé un virage vers des créations plus contemporaines et tous publics, notamment en préparant la création de l’opéra-odyssée Xynthia* (d’après Un ennemi du peuple d’Ibsen) aux côtés de l’autrice Valentine Losseau et du metteur en scène Mikaël Serre. Profondément imprégné des enjeux du texte avant-gardiste d’Ibsen, le Collectif Io initie avec ce nouvel opéra une démarche au-delà de la création musicale.

« C’est un projet dont l’objet, les enjeux dépassent le spectacle. Nous nous sommes penchés sur l’approche durable du spectacle et la protection des ressources en eau. Nous allons utiliser des textiles bio, des colorants naturels, repenser la mobilité des spectateurs et des acteurs afin de limiter les déplacements et éviter la voiture. Depuis je m’implique dans des discussions sur la décarbonisation de la culture. Pour aller au bout d’une telle réflexion, l’appui du lieu de résidence, des collectivités et de toutes les parties prenantes est indispensable, c’est un engagement politique des artistes, des structures culturelles, de toutes les équipes. Nous serions allés beaucoup moins loin si nous n’avions pas été en résidence. »

*Xynthia, à découvrir à l’Opéra de Reims à l’automne 2022.